Nightmares and night watch

La flaque de sang s'agrandit et menace de l'engloutir, pendant que les visages d'Helen, rempli d'effroi et de Randy, du sang plein la bouche, se superposent l'un à l'autre. Zahra ouvre les yeux brusquement, le souffle court et la panique lui enserrant la gorge. Sa main crispée sur sa lampe-torche, elle balaie l'obscurité qui l'entoure, mais personne n'est là.
Elle reste pourtant un moment ainsi, l'air hagard et le dos collé au mur, recroquevillée sur elle-même en attendant qu'une main décharnée se tende soudainement vers elle ou qu'un mort-vivant jaillisse brutalement de la pénombre pour la dévorer.

Il lui faut de longues minutes pour retrouver un semblant de calme, et un bref coup d'oeil à travers la fenêtre lui indique que le soleil ne se lèvera pas avant plusieurs heures. Zay se sent malgré tout incapable de se rendormir et c'est d'une main encore tremblante qu'elle enfile ses chaussures avant de sortir. Sa lampe-torche solidement arrimée entre ses mains faisant office de bouclier rassurant, elle fait quelques pas pour braver ce noir si terrifiant. Le camp endormi et déserté achève de la calmer, même si un frisson vient parcourir son corps sans qu'elle sache vraiment si c'est de froid ou de soulagement.

L'adolescente ignore si elle a le droit de se promener ainsi librement dans le campement, mais elle a envie d'en profiter, et de retarder le moment de retourner dormir. Renversant la tête en arrière, la jeune fille inspire à pleins poumons en regardant les étoiles, laissant ses muscles se détendre petit à petit. Même si Zahra était incapable de les reconnaître, les observer l'apaisait. Savoir que le ciel brillait même au coeur de la nuit était rassurant et...Zay sursauta en sentant quelque chose lui effleurer le visage mais se détendit aussitôt en regardant un papillon de nuit attiré par la lueur de sa lampe. Même lui avait peur du noir, apparemment, et ce constat fit sourire l'adolescente. La bestiole s'éloigna cependant quelques instants plus tard, disparaissant dans l'opacité nocturne et laissant l'insomniaque à nouveau seule. L'angoisse de Zahra restait latente et elle reprit sa marche, à petits pas pour ne déranger personne. Malgré l'heure tardive, il y avait bien quelque chose à faire pour s'occuper et éviter de dormir, non ? N'importe quoi, pourvu qu'elle ne soit pas obligée de fermer les yeux...

Percevant un nouveau mouvement du coin de l'oeil, Zahra plisse les yeux pour distinguer ce qui se passe. Elle n'a rien imaginé, elle a vu quelque chose de blanc et si la nuit est terrifiante pour elle, Zay ne croit pas vraiment aux fantômes. De toute façon même s'ils existent, ils sont bien moins effrayants que les virulents. Son cerveau analyse ce qu'elle voit et un large sourire vient fleurir ses lèvres. Un magnifique chien blanc, qu'elle a déjà aperçu de loin depuis son arrivée, vient de passer, en hauteur. Si l'idée qu'un chien soit de garde dans l'un des postes de surveillance pourrait sembler saugrenu à certains, ce n'est pas le cas de Zay. Elle se souvient qu'avant tout ça, des chiens étaient utilisés pour garder les troupeaux ou même aider la police ou l'armée dans leur travail, alors pourquoi pas surveiller le camp la nuit pendant que les autres dorment ?
En revanche, il devait s'ennuyer tout seul là-haut, et peut-être même qu'il avait faim ?

Décidée, Zahra perd quelques minutes à essayer de se repérer avant de filer aux cuisines. Elle n'a pas dans l'idée de voler de la nourriture, juste apporter un en-cas au chien. Au pire, elle se priverait d'un repas pour compenser la nourriture prise, ce n'était pas très grave. Récupérant rapidement de quoi boire et manger pour le brave animal, l'ado refait le chemin en sens inverse aussi rapidement qu'elle le peut, avant de grimper sur le poste d'observation. Tout sourire, elle pose devant le chien la pomme qu'elle a trouvé et le bol d'eau dont une partie s'est malencontreusement renversée sur son pyjama pendant le trajet. Zay est néanmoins sûre qu'il en reste assez pour que l'animal puisse se désaltérer.
Agenouillée à même le sol et sa lampe-torche posée à côté d'elle, la muette observe le chien et l'incite à manger. Visiblement peu emballé par le fruit qu'il renifle avant de dédaigner, il se recouche sur le sol à côté de deux pieds. Ah, zut, le toutou n'était pas tout seul...
Zahra relève la tête, un peu contrite. Elle n'a rien pris d'autre à manger, et il n'y en aura pas assez pour deux.