(F) Colonie

* Le père de Thalya, Salvador Torres, venait de Porto Rico. C’était un mécanicien, amoureux des vieilles voitures de collection et fan de musique (Latino, antillaise, cubaine, mais aussi country classique). Sa mère, Anna Maria, venait de République Dominicaine et était couturière. Le couple habite dans un premier temps à San Juan où Thalya naît avant de partir pour le Nouveau-Mexique où Salvador et son beau-frère (le mari de la sœur d’Anna Maria) ouvrent un garage. Thalya grandit dans l’appartement au dessus de l’atelier de réparation qu’occupe les deux familles et passent ses journées à jouer avec sa cousine qui est comme une sœur pour elle. Sa tante, Anna Antonella, est rebouteuse et accueille ses patients à la maison. La petite fille observe tout ça avec fascination.
* Un jour, lorsqu’elle a huit ans, Thalya fait des courses avec sa mère dans un marché principalement fréquenté par des populations latinos. Un fou furieux y entre, armé, et ouvre le feu. Anna Maria, sa mère adorée, décède sous ses yeux. La petite fille n’est elle pas blessée mais restera toute sa vie profondément marquée par cet événement. C’est aussi à ce moment qu’elle réalise la cruauté terrible de la discrimination raciale. Plus grande, elle s’engagera et militera contre le port libre d’armes à feu (mais apprendra toutefois à s’en servir pour survivre face aux morts).
* Quelques mois après cet tragédie, sa tante et sa famille rentrent en République Dominicaine, laissant le père et la fille seuls. Ils entretiennent dès lors une relation forte et fusionnelle. Salvador élève comme il peut cette gamine énergique qui n’a pas sa langue dans sa poche. Il lui apprend le respect, la droiture, et lui transmet sa passion pour la mécanique et surtout la musique.
* Thalya n’a jamais aimé l’école. Si elle a toujours été bonne élève, gamine intelligente et curieuse, elle a souvent l’impression que ses professeurs ne lui donnent qu’une partie de la vérité, qu’une version de l’Histoire, tronquée par un biais racial. Alors elle cherche par elle même, va voir des associations, tente de comprendre et n’hésite pas à répondre à ses profs lorsque ce qu’ils disent lui semble faux. Souvent punie, elle s’en fiche et commence à s’engager socialement pour les droits des minorités et surtout des femmes. Adolescente, elle s’inscrit à plusieurs associations qui aide les primo-arrivants. C’est comme ça qu’elle se retrouve à animer un atelier de céramique, un peu par hasard. Elle apprend en même temps que ceux qu’elle gère, et c’est le coup de cœur pour cette discipline.
* Après le lycée, elle laisse tomber les études et décide de voyager (son rêve de toujours). Elle travaille dur pour gagner assez d’argent pour le faire et s’envole dès qu’elle le peut. Mexique, Argentine, Cuba et bien sur République Dominicaine et Porto Rico ! Elle ne reste jamais bien longtemps et revient toujours au Nouveau-Mexique entre deux destinations pour aider son père au garage et revoir tous ses amis du quartier.
* Au début de l’épidémie, elle se trouve justement chez son père. Elle voit avec lui, à travers l’écran de la télévision, la situation empirer. Ils comprennent qu’il faut fuir. Où ? Qu’importe du moment que c’est loin ! Arrivés comme tant d’autres à la gare routière, ils voient cette dernière envahie par les morts qui déferlent sur eux. Salvador a tout juste le temps de pousser sa fille dans le dernier car avant que la porte se referme. Thalya le verra se faire dévorer sous ses yeux, et se retrouvera seule. Le choc est violent, et par dessus le marché elle apprend que le car se dirige vers le Nord. Après bien des péripéties, elle se retrouve en Colombie-Britannique avec quelques autres survivants.
* Son petit groupe survit comme il peut en trouvant refuge dans des maisons abandonnées. Thalya apprend à la dure à survivre et aussi à défendre sa vie. Un jour où elle est seule en expédition (vers janvier 2019) , sa voiture dérape sur une plaque de verglas et elle a un accident. Une tempête approche tout comme les morts. Un homme la tire de là et la conduit dans une petite cabane où ils trouvent refuge pour échapper à la tempête de neige. C’est Khaaleb, un sang mêlé mohawk. Si au départ leurs rapports sont tendus, ils finissent par tisser une relation sentimentale très forte. A la fin de la tempête, elle souhaite retrouver ses compagnons, lui doit retourner sa famille à Kelowna où il vit. Ils se séparent, mais Thalya, qui a constaté que ses «amis » l’avaient en réalité abandonné, le rejoint quelques semaines plus tard. Ils vivent dès lors ensemble dans le chalet de Khaaleb dans les environs de la ville. Ancien garde forestier, il lui apprend tout ce qu’il sait sur la nature et tout ce qui y vit. Elle rencontre aussi plusieurs personnes dans les différentes communautés de Kelowna avec qui elle devient amie. Elle qui a toujours aimé l’animation des villes se surprend à se sentir bien dans la forêt. Elle y trouve une sérénité inconnue jusque là et renoue aussi par le biais des traditions mohawks de Khaaleb, à une certaine forme de spiritualité.
[Pour plus d’informations sur ce moment de leur vie à deux au chalet, n’hésitez pas à venir me voir]
* Thalya tombe enceinte fin août 2019. Dans un premier temps, c’est un peu la panique. Quel folie d’amener un enfant dans ce monde là ! Mais alors qu’elle sait que la raison voudrait de s’en séparer, elle se rend compte que cette décision est impossible à prendre pour elle. Elle veut cet enfant. C’est son choix. Un choix que Khaaleb accepte et accueille avec joie (et peur bien entendu aussi). Bien que fatiguée et souvent nauséeuse pendant le premier trimestre, la jeune femme tient bon, même lorsqu’on lui apprend (alors qu’elle est déjà au sixième mois de grossesse) qu’elle attend… des jumeaux !
* Entre février et mars 2020, les coups durs s’enchaînent : Khaaleb perd son frère Terry dans une avalanche. Cette disparition affecte beaucoup Thalya qui s’était liée d’une amitié sincère avec son beau-frère. Le couple adopte son chien, Charlotte, un berger allemand. Puis c’est l’exode. Sans y être préparé, ils sont obligés de quitter leur chalet, Kelowna, et tout ce qu’ils connaissent pour partir vers l’île de Vancouver. La jeune femme est déçue car elle avait imaginé élever ses enfants au chalet dans la forêt, mais sait que c’est pour le mieux.